
Je suis inlassablement séduite par les paysages bucoliques du Perche, mais aussi et surtout par son patrimoine bâti discret et de toute beauté. Disséminés dans le bocage, manoir, ferme, moulin, bouverie, maisons d’un « village » ou d’un bourg, les habitations sont partout présentes, et, cependant elles ne deviennent jamais un élément majeur du paysage. La variété des habitats se fond dans le terroir et coexiste en douce et tranquille harmonie.
Je vous propose de partir à la découverte des belles du bocage : les longères.
Les longères sont des fermes rectangulaires qu’on appelle en architecture de « type bloc à terre » ou « maison bloc », c’est à dire qu’un seul bâtiment concentre les fonctions de logement et d’exploitation agricoles qui se juxtaposent.
Ce plan longitudinal est une configuration minimale qui a évolué au cours du temps suivant les besoins et les moyens des paysans puisqu’une ou plusieurs extensions en équerre peuvent être rajoutées. On y trouve notamment le four à pain qui s’apparente à un petit logis, éloigné de la partie habitation pour limiter les risques d’incendie.

Rentrons dans le vif du sujet :
La longère est l’emblème même de l’architecture agricole du Perche. Les influences beauceronne, normande, alençonnaise et ligérienne (du bassin de la Loire) s’exercent sur la construction paysanne. Au coeur du Perche c’est le calcaire qui domine; au nord et à l’est, briques et silex font leur apparition, au sud, les colombages et le grison.
Les longères présentent un schéma au plan rectangulaire allongé : maison-bloc à terre avec une toiture pendue à deux pans et deux pignons permettant toutes les extensions latérales, véritables maisons évolutives avec l’habitation et les dépendances sous le même toit.
Les façades principales sont orientées au sud et les façades nord, aveugles ou aux ouvertures petites et peu nombreuses sont parfois renforcées par des annexes (laiterie, cellier), réduisant les échanges thermiques avec l’extérieur.

Les caves se généralisent dans le Perche oriental : l’accès se fait de l’extérieur par un escalier caché par une trappe horizontale ou inclinée en fonction de la hauteur du plancher.
Sans étage, les longères abritent, sous un toit pentu, entre 45 et 55°, et couvert de tuiles de terre cuite, de vastes greniers utilisés par les réserves. La toiture est percée de lucarnes.
La porte fermière est en plein bois avec deux panneaux ouvrants, l’inférieur servant d’accoudoir et évitant l’accès des petits animaux. Les fenêtres sont plus hautes que larges et donnent un effet d’élévation et participent à l’harmonie des proportions de la maison tout en offrant une quantité et une qualité suffisante de lumière. Les croisées, à petits bois épais (près de 4 cm de moyenne) ont en général trois carreaux en hauteur.
Les corniches en pierre, plus ou moins moulurées, qui assurent la continuité entre le mur et la toiture, les volets, faits de grosses planches brutes, les anneaux de fer scellés dans le mur, les chatières sur les toits pour aérer le grenier sont les seuls détails qui rompent avec la sobriété des formes et qui ajoutent une touche esthétique pleine de charme. Un soin est aussi particulièrement donné à la qualité des encadrements d’ouverture, à la finesse de ses lucarnes, la chaleur des enduits…

Cet ensemble parfaitement équilibré est construit avec des matériaux trouvés sur place ou à proximité.
Pour les maçonneries : calcaire crayeux du Corbonnais (coeur Perche), tuffeau du Fertois, de Mondoubleau et de l’ouest du Mortagnais, moellons tapissant les murs dans le Nogentais et le Perche-Gouet, belles pierres de tailles du Bellêmois, du Mamertin et du nord-ouest du Perche, silex dans le Nord-est, grison, grès « roussard », les sables du Perche.
L’argile omniprésente a permis l’installation de briqueteries dans le Perche Vendômois, le Gouët, les régions de Longny, Mortagne, Bellême et dans le nord Perche. Il faudra attendre le milieu du XIXème siècle pour que peu à peu la tuile remplace le chaume.

La longère est une bâtisse avant tout fonctionnelle et capable de s’adapter avec ingéniosité aux besoins des activités agricoles. Harmonie, modestie, simplicité, tels sont les principes de la longère percheronne. Elle a tous les attraits des maisons de pays : de beaux volumes, des matériaux traditionnels, des espaces ouverts de plain-pied sur le jardin… un art de vivre qui fait de ces belles du bocage des biens très recherchés…
Merci à Valérie et Olier pour m’avoir autorisée à publier des photos de leurs belles demeures !
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